Entretien avec Grégoire, saxophoniste et professeur de saxophone

À propos de l'auteur : Stefan Joubert

Stefan Joubert est le directeur de l'Institut de Musique de Paris. Passionné par l'éducation musicale pour adultes, il croit qu'il n'est jamais trop tard pour commencer à apprendre un instrument de musique.

Stefan Joubert : Bonjour Grégoire. Parlez-moi de vous et de la manière dont vous vous êtes intéressé au saxophone.

Grégoire : Bonjour, j’ai d’abord hésité entre la trompette et le saxophone. J’ai fait un cours d’essai de chaque à l’âge de 7 ans et j’ai choisi le prof qui était plus jeune et plus sympa. Il se trouve que c’était le professeur de saxophone. Autant dire que pour moi, la qualité de la relation prof/élève est importante.

Stefan Joubert : Absolument, je suis tout à fait d’accord !

Stefan Joubert : Comment avez-vous vécu les 2 ou 3 premières années d’apprentissage du saxophone ? Était-ce difficile ?

Grégoire : J’avoue ne pas avoir beaucoup de souvenirs précis de mes premières années. Je me laissais porter. Mais j’ai gardé un souvenir positif. J’allais aux cours avec plaisir, même si le saxophone était un peu lourd à transporter pour mon jeune âge.

Stefan Joubert : Avez-vous commencé directement par le jazz ou le classique ?

Grégoire : J’ai d’abord commencé par le classique principalement car c’était la spécialité de mon professeur. Par la suite, plus il s’est intéressé au jazz, plus il me l’a enseigné. Mes premiers souvenirs avec le jazz remontent à l’âge de 12-13 ans. Mon professeur m’apprenait les mélodies de standards simples.

Ensuite, vers l’âge de 15-16 ans, nous avons plongé davantage dans le jazz en reprenant lentement des thèmes et des solos de Charlie Parker notamment.

Stefan Joubert : C’est très logique !

Stefan Joubert : Utiliseriez-vous une approche similaire avec un adulte souhaitant apprendre le saxophone jazz ?

Grégoire : Oui. En connaissant seulement quelques notes sur le saxophone, nous pouvons déjà jouer des standards qui ont un thème simple. Je pense par exemple à “Cantaloupe Island” d’Herbie Hancock.

Stefan Joubert : C’est tout à fait logique, car l’élève a l’impression de progresser lui aussi !

Grégoire : Le plus important, c’est de jouer un répertoire qui plaît à l’élève. Même sur des chansons pop, nous pouvons pratiquer l’improvisation.

Stefan Joubert : Comment aidez-vous un élève qui veut vraiment maîtriser le répertoire de jazz ? Travaillez-vous beaucoup sur les études II V I ? Quelle approche utilisez-vous ?

Grégoire : Il n’y a pas une seule approche miracle qui fonctionnera avec tous les élèves. Mais c’est vrai que le travail sur les cadences récurrentes du répertoire jazz, comme le II V I, permettra à l’élève d’apprendre de multiples standards assez rapidement.

Stefan Joubert : Oui, c’est vrai !

Stefan Joubert : Quelles stratégies utilisez-vous pour maintenir la motivation et l’engagement des élèves adultes dans leurs études de saxophone ?

Grégoire : J’accorde beaucoup d’importance à la motivation dans l’apprentissage. Je suis actuellement en train d’écrire un mémoire à ce sujet en m’inspirant notamment des recherches en management et en discutant avec des coachs pour musiciens. À titre d’exemple, j’ai pour habitude, à la fin de chaque cours, d’envoyer 3 morceaux “découverte” à l’élève pour qu’il puisse se faire petit à petit des références en termes de son, de répertoire et de goût.

Le paramètre qui me semble également capital dans la motivation, c’est le plaisir. J’essaie donc de montrer à l’élève comment il peut se faire plaisir même lorsqu’il s’agit d’un exercice de son ou de gammes.

Je leur donne également des méthodes pour qu’ils puissent s’organiser dans leur travail et voir objectivement leurs progrès.

Stefan Joubert : C’est génial !

Stefan Joubert : Comment abordez-vous les problèmes physiques courants, comme la fatigue de l’embouchure, que les adultes peuvent rencontrer ?

Grégoire : L’avantage du saxophone, par rapport aux cuivres, c’est qu’on se fatigue beaucoup moins rapidement au niveau de l’embouchure. Et l’avantage du saxophone jazz par rapport au saxophone classique, c’est que l’embouchure est beaucoup plus relâchée. Je me souviens que lorsque je faisais beaucoup de saxophone classique, je devais mettre du papier à cigarette sur mes dents inférieures pour éviter de me blesser la lèvre. En saxophone jazz, je n’en ai pas du tout besoin.

Le rôle du professeur, c’est aussi de prévenir les blessures qui peuvent arriver si on est trop tendu et crispé. C’est pour cela que je suis aussi vigilant à la posture de l’élève, à son relâchement.

Stefan Joubert : Oui, c’est très important !

Stefan Joubert : Pouvez-vous nous faire part de votre point de vue sur l’importance de la théorie musicale et de la lecture à vue pour les saxophonistes adultes ?

Grégoire : Un des objectifs de l’enseignement de la musique, à mon avis, c’est que l’élève puisse devenir autonome dans sa pratique musicale. La lecture à vue permet de pouvoir jouer avec d’autres musiciens assez rapidement. Mais ce n’est pas indispensable. Nous pouvons aussi jouer avec d’autres musiciens sur des standards connus, sans partition, en jam session par exemple. C’est pour cela qu’il est important de connaître les objectifs des élèves, pour que je puisse m’adapter, et ne pas leur enseigner quelque chose qui ne les intéresse pas.
De manière générale, la théorie musicale permet de parler un langage commun, pour analyser par exemple des solos mythiques et pouvoir s’en inspirer dans notre propre jeu. Mais il existe de très bons musiciens de jazz qui ne savent pas lire la musique. C’est une musique qui se transmet beaucoup oralement, en écoutant et en reproduisant.

Stefan Joubert : Merci beaucoup d’avoir partagé votre sagesse avec nous, Grégoire !

Stefan Joubert : Comment abordez-vous l’enseignement aux adultes qui ont un emploi du temps chargé et un temps de pratique limité ?

Grégoire : Tout le monde le sait, pratiquer un peu régulièrement plutôt que beaucoup avant le cours est plus efficace. Mais en plus de l’efficacité, le fait de rester en contact avec notre pratique sur une base quotidienne permet aussi l’entretien de la motivation. Se donner comme objectif de faire au moins 5 minutes de saxophone par jour suffit largement. Parfois, les 5 minutes seront dépassées car nous avons envie de continuer à pratiquer.

Stefan Joubert : Merci Grégoire, c’est un bon conseil !

Stefan Joubert : Nous vous remercions également pour le temps que vous nous avez consacré et pour avoir partagé ces merveilleux conseils avec nos lecteurs.

Grégoire : Merci à vous, c’était un plaisir.

A propos de Grégoire

Grégoire est saxophoniste, compositeur et enseignant. Il est diplômé en jazz et en pédagogie du Conservatoire National Supérieur de Paris. Il a également étudié la musicologie à La Sorbonne, le saxophone classique et jazz au Conservatoire Régional de Paris, ainsi qu’au Pôle Supérieur de Paris Boulogne Billancourt. Il s’est formé au saxophone auprès de Baptiste Herbin, Stéphane Guillaume, Jean-Charles Richard, Christian Wirth, et à l’arrangement avec Pierre Bertrand, Emil Spanyi et François Théberge. Grégoire a composé notamment pour un court métrage intitulé “Mirages” en 2020, et pour une pièce de théâtre intitulée “Le Faucon” en 2023.

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